Une parenthèse historique au pays de Rabelais

Amoureux de la bonne chère et de lieux historiques, nous partons en famille sur les pas de Rabelais, à Chinon, entre forteresse et bords de Vienne. Avec mon mari, j’adore arpenter ce vignoble aux vins renommés. Nos neveux et leurs cousins sont impatients de faire le plein de verdure dans le Véron.

Jour 1 : de la forteresse à la Devinière, musée Rabelais

Remonter le temps à la forteresse de Chinon

Nous sommes au cœur de la cité médiévale de Chinon, ville d’Art et d’Histoire. Mais c’est un ascenseur vitré ultra-moderne qui nous propulse (gratuitement !) vers la forteresse. Il se situe au Nord de la place de la Fontaine, où nous venons d’avaler un petit déjeuner avec les enfants. Ce lien de fer et d’acier nous hisse sur le coteau en deux temps trois mouvements !

Perchés sur l’imposant éperon rocheux qui domine la ville, nous embrassons une vue magnifique sur les toits et la Vienne, avant de filer à la forteresse royale de Chinon. Elle est l'un des rares châteaux forts du Moyen Âge dans la vallée de la Loire. Construite entre les 10e et 15e siècles, elle est constituée en fait de "trois châteaux" séparés par des fossés. Elle a fait l’objet d’un spectaculaire projet de restructuration entre 2000 et 2010. Plusieurs parcours de visite sont aujourd’hui possibles : guidée ; libre avec un livret interactif qui déclenche des bornes sonores ou des écrans tactiles ; avec l’Histopad (une tablette numérique, sans supplément) ou encore avec des animations dédiées aux familles en périodes de vacances. Prévoyez au moins 1h30.

Foteresse royale©Stevens Fremont - ADT Touraine

Une visite conviviale en réalité augmentée

Les enfants optent évidemment pour la tablette ! Grâce aux contenus de réalité virtuelle, huit salles transformées ou disparues sont reconstituées dans leur état d’origine, permettant une immersion spectaculaire à 360°au cœur des 12e, 14e et 15e siècles. À eux les engins de guerre et les pièces d’artillerie en 3D ! Cet outil permet de voir à travers les murs pour explorer des espaces inaccessibles et d’interagir avec les collections.

Visite avec l'Histopad
Visite avec l'Histopad

Nous assistons même à la fameuse scène de la "Reconnaissance" avec Jeanne d’Arc, venue rencontrer Charles VII (dont la chambre intime a été reconstituée) en 1429. On apprendra qu’elle est en réalité venue deux fois voir le dauphin à Chinon cette année-là…

Nous tentons le selfie médiéval en endossant virtuellement les costumes proposés par l’Histopad. Fou rire garanti ! La forteresse royale a en effet signé la charte Môm'art du "musée joyeux !" Les enfants s’amusent à collecter des objets précieux cachés dans les décors 3D, façon chasse au trésor ! Et un parcours adapté est proposé aux 5-7 ans.

En sortant des logis royaux, nous poursuivons l’exploration dans le parc de façon plus sportive, en montant au sommet des tours. Le donjon du Coudray offre un excellent point de vue sur l’ensemble du château, des logis royaux et de la ville.

Une balade bucolique sur le chemin des Remparts

Nous retournons dans le centre-ville en empruntant le bucolique chemin des Remparts, qui démarre après la tour de l'Horloge (14e). Mince et élancée, cette « porte » du château du Milieu tient son nom de l’horloge installée dans le clocheton qui domine la toiture. Cette courte balade offre des points de vue inédits sur la forteresse et ses douves.

Tour de l'Horloge©Emilie Boillot
Tour de l'Horloge©Emilie Boillot

De retour en bas, nous empruntons l’artère principale, la rue Haute-Saint-Maurice, qui abrite de beaux hôtels particuliers, dont le palais du Baillage et la demeure Renaissance de Poirier de Beauvais. Rues étroites, maisons à pans de bois… la ville recèle 31 Monuments Historiques. Au niveau de la margelle, un panneau rappelle la visite de Jeanne d’Arc à Chinon.

De la chapelle troglo aux quais de la Vienne

Sur le coteau percé d’innombrables cavités, les plus courageux s’aventurent jusqu’à Sainte-Radegonde, à l’Est du centre-ville, où se trouve une chapelle romane semi-troglodytique (ouverte à la visite à certaines périodes).

Pour notre part, nous continuons dans la rue Voltaire jusqu’à la place de la Fontaine, ombragée et agréable pour siroter un verre : mon mari opte pour un chinon blanc, rafraîchissant en guise d’apéritif, et moi pour un chinon rosé frais et friand. En traversant la place du Général-de-Gaulle, nous accédons aux quais de la Vienne, où une statue rend hommage à Rabelais.

Au passage, une halte s’impose à la pâtisserie Ayrole pour faire honneur à une délicieuse spécialité locale, la tarte vigneronne : une pâte feuilletée caramélisée garnie de pommes coupées très finement et nappées de confit de vin de chinon… À l’heure du pique-nique, toute la famille succombe !

Nous traversons le pont pour bénéficier de la meilleure vue sur la ville et son château. Un peu plus loin, la Guinguette de Chinon offre aussi un sublime panorama sur la forteresse, qui se reflète dans la rivière… Un arrêt tout désigné pour le café.

À La Devinière, musée Rabelais

Bien décidés à suivre les pas de Rabelais, nous choisissons de passer l’après-midi dans son fief, à 7 km d’ici : La Devinière, à Seuilly.

Lieu présumé de naissance de l’écrivain-médecin (en 1483 ou 1494), l’endroit nous saisit immédiatement par sa sérénité et sa beauté. La campagne vallonnée est le théâtre des Guerres picrocholines narrées dans l’œuvre Gargantua de cette figure majeure de la littérature française.

À la découverte des temps forts de la vie de Rabelais

Nous commençons la visite par la maison du métayer, puis par le pigeonnier-grange du 17e siècle, emblématique du lieu. Ses 288 trous (appelés « boulins ») sont révélateurs de la fortune du propriétaire : plus il y en avait, plus il était riche.

Les collections présentées à l’intérieur permettent de découvrir les différentes facettes de l’écrivain (également médecin érudit et fantaisiste, homme d’Église…), ainsi que son œuvre. La visite nous fait découvrir une langue imagée et drôle, riche en contrepèteries et en inventions verbales. Nous découvrons avec surprise que Rabelais est à l’origine de nombreuses expressions devenues communes.

Signataire de la charte Môm’Art, le musée offre un parcours ludique pour les enfants à partir de 7 ans. En compagnie du géant Gargantua, ils découvrent sa naissance extraordinaire, son drôle de langage, les expressions à rire, les plantes du jardin…

La Devinière et les expositions
Les expositions

Le logis de Rabelais, construit au 15e siècle, est une belle maison de maître en tuffeau, la pierre calcaire de Touraine. À l’étage du logis, nous accédons à la chambre natale de Rabelais. En gravissant l’escalier, nous contemplons le vignoble. Au loin se détache la belle silhouette du château du Coudray-Montpensier.

Véritable "ventre" de cette maison des champs, la maison du vigneron abrite un four, un potager en pierre, qui servaient à cuire le potage. Nous nous enfonçons ensuite dans les vastes caves troglodytiques issues de l’extraction du tuffeau qui servit à construire les maisons du domaine.

N’hésitez pas à ramener en souvenir une bouteille de chinon du Clos de La Devinière, vendu à la boutique aux côtés des épices Rabelais un peu vintage !

Un paysage littéraire remarquable

Pour une approche plus rabelaisienne, optez pour une "visites à déguster" avec des vins du domaine et les célèbres fouaces évoquées dans Gargantua.

Nous préférons télécharger gratuitement sur mon smarthone une appli qui propose un parcours avec douze stations sonores géolocalisées entre La Devinière et l’abbaye de Seuilly. Il nous faut une trentaine de minutes le long du sentier d’interprétation de 600 m qui unit ces deux lieux symboliques dans l’œuvre de Rabelais, avec des lectures de Gargantua.

Si vous êtes marcheurs, choisissez la randonnée "Au pays de Rabelais" de 8 km autour de La Devinière, dans ce paysage littéraire remarquable.

De retour à Chinon, nous regagnons le centre historique pour une soirée épicurienne autour d’une bonne table, que Rabelais aurait probablement approuvée !

Jour 2 : l’art de l’école buissonnière dans le bocage du Véron

Le lendemain, nous poursuivons notre parenthèse bucolique dans le Véron. Ce beau pays de bocage à la confluence de la Loire et de la Vienne, connaît depuis toujours des crues périodiques. J’aime particulièrement m’y promener entre mars et avril, quand fleurissent les magnifiques fritillaires pintades. Pas toujours facile de les débusquer. Il faut avoir l’œil sur les prairies inondables qui bordent la Vienne, autour de Savigny-en-Véron. Avec un peu de chance, vous apercevrez d’abord de petites taches roses parmi les herbes.

En y regardant de plus près, de magnifiques clochettes où se dessine un délicat damier se révèlent.
Ne les ramassez pas, elles sont protégées ! Au début du printemps, il est possible d’en voir dans les prairies du fond à l’écomusée du Véron, nous indique Fabienne, médiatrice, tout en nourrissant les moutons d’Ouessant et landes de Bretagne. Ils voisinent avec les chèvres poitevines, les vaches maraîchine et pie noire de Bretagne.

Animaux, art et exposition à l'écomusée du Véron

Sous ses apparences de ferme, l’écomusée du Véron est avant tout un lieu de culture dans un écrin de nature. Nous nous baladons sur le sentier, visitons une exposition où l’art, l’histoire et l’archéologie se côtoient. Niki de Saint Phalle, Rodin… des œuvres issues de musées nationaux y sont même exposées.

Des ateliers créatifs permettent d’apprendre à confectionner de drôles de jouets à partir d’éléments naturels glanées autour de nous, à faire des impressions végétales sur du tissu, à sculpter le tuffeau, mais on peut tout aussi bien s’initier à la fabrication du beurre, à l’apiculture ou à la vannerie buissonnière… Un lieu apaisant et plein de ressources pour toute la famille !

Un petit coucou au baudet du Poitou et nous poursuivons notre exploration du Véron, direction Beaumont.

Baudet du Poitou
Baudet du Poitou

 

Vins de chinon et curiosités à Beaumont-en-Véron

Puisque l’AOC chinon est la 1ère appellation de vin rouge de Loire en volume, nous faisons un détour à la Maison des vins du Véron, à Beaumont-en-Véron, entre Chinon et Bourgueil.

Située non loin de la mairie, cette cave permet de déguster les vins d’une vingtaine de vignerons. Le chinon se décline en trois couleurs, chacun peut donc y trouver son bonheur : rouge (80 % de la production), à base de cabernet franc, rosé (15 %) et d’excellents blanc à base de chenin, cépage emblématique du Val de Loire, qui méritent d’être mieux connus (5 %). On y trouve notamment les vignerons du manoir de la Courtinière (65, rue du Véron), un bel ensemble du 16e siècle qui attire notre attention depuis la route. Cet ancien logis féodal conserve un portail d'entrée surmonté d'une galerie, et quelques vestiges de façades décorés de pilastres et de motifs sculptés s’inspirant de la nature (feuillages, coquillages).

Nous sommes séduits par le bâti traditionnel du Véron, qui recèle de belles demeures du 19e siècle et d’élégants manoirs. Pour le moins insolite, la maison de pierre, située à l’entrée de Beaumont, au lieu-dit La Pénesais, nous intrigue, avec son toit en tuffeau ! C’est un lieu privé qui n’a pas livré tous ses secrets, nous confie la voisine d’en face !

Au bout de la rue du Colombier, nous finissons par trouver les Caves aux Fièvres (au niveau du n° 1). Dédale de pierre, ce lieu était à l'origine une carrière permettant d'extraire le tuffeau pour la construction des demeures locales.

Un air de Méditerranée dans les Puys du Chinonais

Après les profondeurs, nous décidons de prendre un peu de hauteur en pique-niquant dans les Puys du Chinonais, au milieu des vignes.

Une balade d’une heure (3,5 km) très facile nous entraîne sur ce site naturel composé de buttes calcaires, nées des dernières plissures géologiques des monts d’Auvergne. Ces collines qui culminent à 88 m d’altitude (pour le puy Besnard) se caractérisent par des pelouses sèches riches en orchidées et jouissent d’un microclimat sec. Une impression de garrigue se dégage des lieux. Quel plaisir d’arpenter ce sol moelleux où virevoltent de nombreux papillons !

Le parcours, très bien balisé, passe par une ancienne carrière de tuffeau jaune. Dans le sous-bois, nous croisons une multitude d’orchidées malheureusement défleuries : des limodores à feuilles avortées. Promis, nous reviendrons en juin pour voir ces spectaculaires plantes protégées qui ressemblent à des asperges violacées !

Candes-Saint-Martin : à la confluence de la Vienne et de la Loire

En attendant, nous mettons le cap vers la confluence : pas question de louper le coucher du soleil à Candes-Saint-Martin. Nous grimpons jusqu’au panorama qui domine ce village, classé parmi les "Plus Beaux Villages de France", particulièrement coquet.

Nous redescendons dans le centre du village, où de ravissantes ruelles bordées de roses trémières nous mènent sur les quais de la Vienne, que les eaux de la Vienne ont tout juste rejointe. L’heure est venue de contempler la confluence depuis un banc en bordure du fleuve. Pas même une sterne pour briser le silence…

 

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