Mondialement connue pour ses châteaux prestigieux (Azay-le-Rideau, Saumur, Langeais, Chinon, Villandry…), la vallée de la Loire abrite aussi une multitude de manoirs, d’hôtels particuliers et de maisons de maîtres. Situé dans cette vallée des châteaux, le Parc Loire-Anjou-Touraine regorge de merveilles architecturales à visiter et admirer.
Tout au long du Moyen-Âge, les comtes de Blois, d’Anjou et du Poitou se disputent les pays Saumurois et Chinonais. Pour protéger leurs résidences et afficher leur pouvoir, ils bâtissent de puissantes forteresses, comme les châteaux de Saumur, Langeais, Montreuil-Bellay, Chinon, Montsoreau, etc. Ces places stratégiques sont confiées à des hommes de confiance.
Au milieu du XIe siècle, le comte d’Anjou prend le pouvoir sur le territoire. Tout au long des XIIe et XIIIe siècles, alors que Plantagenêts et Capétiens se disputent la province, un réseau d’édifices secondaires vient compléter le système défensif organisé autour des forteresses, et renforcer l’influence des seigneurs successifs. Certains ont conservé leurs allures de châteaux forts (Montsabert, Crissay-sur-Manse, etc.), tandis que d’autres ont été remaniés dans une optique plus résidentielle, comme le château de Brézé ou le château de Gizeux.
La guerre de Cent Ans démarre en 1337, et les conflits armés se multiplient en Anjou. En 1427, Charles VII, héritier légitime du royaume de France, installe sa cour au château de Chinon. C’est entre les murs de la forteresse royale que Jeanne d’Arc convainc le Dauphin d’aller se faire sacrer à Reims.
Après la guerre, René d’Anjou organise la reprise économique du territoire, notamment grâce à divers chantiers de construction ou de reconstruction. Le « bon roi René » et ses proches font ériger diverses demeures de plaisance : l’architecture se concentre davantage sur l’agrément que sur la fonction défensive.
À la mort de René d’Anjou, la province est réintégrée dans le Royaume de France. La cour de Louis XI s’installe sur les bords de Loire, dans les environs de Tours. C’est une période faste pour l’Anjou et la Touraine, au cours de laquelle s’érigent les grands châteaux que l’on visite encore aujourd’hui : le château d’Azay-le-Rideau, celui de Villandry, de L'Islette… Dans les campagnes, manoirs et maisons de maîtres se multiplient, témoins de la prospérité de la région.
Les demeures royales : les châteaux de Chinon, Saumur et Langeais
Au milieu du XIIe siècle, l'Empire Plantagenêt s’étend des Pyrénées à l’Écosse : le comté d’Anjou est au cœur de cet Empire. Henri II Plantagenêt, roi d’Angleterre et comte d’Anjou, fait de Chinon sa capitale continentale. Il fait construire le fort Saint-Georges au cœur de la forteresse, ce qui n’empêchera pas le roi de France Philippe-Auguste de s’emparer du château de Chinon en 1205. Pour le protéger des Plantagenêt, il renforce les remparts et fait construire le donjon du Coudray. Plus tard, la cour de Charles VII, héritier du trône de France, s’installe à Chinon, et le château reste une possession royale jusqu’au XVIIe siècle.
À une trentaine de kilomètres, le château de Saumur est édifié au Xe siècle, mais doit sa physionomie actuelle aux travaux de reconstruction lancés par Louis Ier d’Anjou en 1367. Derrière son chemin de ronde orné de fleurs de lys et flanqué de tours octogonales, le château de Saumur est à la fois une forteresse et une résidence princière. Le somptueux bâtiment que l’on visite aujourd’hui est à peu près identique à l’image qui en est donnée dans les Très Riches Heures du duc de Berry, célèbre manuscrit enluminé du XVe siècle.
Enfin, le roi Louis XI, fils de Charles VII et de Marie d'Anjou, est un grand amateur de la Touraine. S’il réside principalement au château de Plessis-lez-Tours, on lui doit également la reconstruction du château de Langeais, détruit par les Anglais lors de la guerre de Cent Ans. Les travaux s’achèvent en 1469. Sur son promontoire rocheux surplombant la Loire, le château est à la fois une forteresse et une somptueuse résidence royale, emblématique de l’architecture de la fin du Moyen-Âge.
Le Roi René et la prospérité de l’Anjou
Le « bon roi René » est l’une des grandes figures de la fin du Moyen-Âge en Anjou. Cumulant les titres (duc d'Anjou, comte de Provence, duc de Bar et de Lorraine, roi de Naples, de Sicile et de Jérusalem), René s’attache au développement de ses duchés, dont l’Anjou. Son administration permet une reprise économique rapide de la région après la Guerre de Cent Ans, qui bénéfice à toutes les classes sociales.
Amateur du Saumurois, il fait restaurer les châteaux de Saumur et de Beaufort. Il aime aussi les manoirs plus modestes, comme ceux de la Ménitré ou de Launay, encore visibles aujourd’hui.
Ses proches suivent son exemple, et profitent de la reprise économique pour faire agrandir ou rénover leurs châteaux et manoirs. En 1448, le Roi René donne à Gilles de Maillé-Brézé l’autorisation de fortifier son château et creuser des fossés : les douves du château de Brézé sont aujourd’hui les plus profondes d'Europe (18 mètres). À Grézillé, le sénéchal d’Anjou (officier au service du duc) profite de la reconstruction du château de Pimpéan pour décorer la voûte de sa chapelle de superbes peintures murales. C’est également à cette époque que Guillaume d’Harcourt, beau-frère de René d’Anjou, fait agrandir et embellir le château de Montreuil-Bellay.
La noblesse et la bourgeoisie locales ne sont pas en reste. Aux côtés des grandes demeures seigneuriales, les hôtels particuliers et maisons bourgeoises se multiplient autour de Saumur, Montreuil-Bellay, Montsoreau, Longué, Souzay… Cet âge d’or se prolonge après la mort du bon roi René, et dure jusqu’au XVIe siècle.
Les châteaux des grands serviteurs du royaume
À partir du XVe siècle, le Val de Loire est le siège de la Cour. De nombreuses familles tourangelles ou angevines sont au service du roi ; certaines entretiennent des liens familiaux avec celui-ci, ou occupent des offices importants (chambellan, chancelier…). Ces proches du pouvoir royal font construire les châteaux de Rivau, de Montsoreau, du Coudray-Montpensier, d’Ussé, de Crissay-sur-Manse.
Mais les châteaux les plus prestigieux de la Touraine datent plutôt de la Renaissance. Le somptueux château d’Azay-le-Rideau est construit de 1518 à 1523, et son petit frère le château de l’Islette est achevé en 1530. Mais ce dernier est surtout connu pour avoir abrité les amours d’Auguste Rodin et de sa muse Camille Claudel à la fin du XIXe siècle ! Quelques années plus tard, c’est le château de Villandry qui se transforme. Il est le dernier palais construit en bord de Loire au XVIe siècle. Ses pavillons carrés annoncent l’architecture classique, qui succède au style Renaissance.
L’héritage du XVIIe siècle est plus modeste. La famille du poète Joachim du Bellay rénove le château de Gizeux ; leurs superbes tombeaux sculptés sont aujourd’hui conservés dans l’église du village. Il ne reste presque rien des grandes réalisations classiques de l’époque, hormis le parc du château de Richelieu, la chapelle du Clos de Chavigny (œuvre de l’architecte du roi Pierre Le Muet), et le pigeonnier de l’ancien château de Roncée.
De même, le XVIIIe compte peu de grandes œuvres architecturales, hormis le château de Montgeoffroy, projet exceptionnel par son ampleur et sa cohérence. Construit en 1772 sous la houlette de l’architecte parisien Vincent Barré, l’un des créateurs du style Louis XVI, il est la demeure du Maréchal de France Arnold de Contades. L’édifice a traversé la Révolution Française sans dégâts : on peut encore y admirer le superbe mobilier d’époque.
Manoirs, hôtels particuliers et maisons de plaisance
Si le Val de Loire est célèbre pour ses châteaux, il regorge également de manoirs et de maisons appartenant aux seigneurs ruraux.
Dans la campagne, ces demeures se composent le plus souvent d’un corps de logis (bâtiment principal) à un étage. L’escalier est logé dans une tour polygonale, accolée à la façade. Les toitures en ardoises sont à deux pentes très prononcées, et ponctuées de lucarnes (fenêtres) à pignon triangulaire. La physionomie du manoir se décline à partir de ce modèle en fonction des moyens de son propriétaire.
Au sein du Parc Loire-Anjou-Touraine, un exemple typique est le Manoir de la Grand'Maison, à Longué-Jumelles, ou bien le château de Saché qui abrite aujourd’hui le Musée Balzac. L’écrivain venait en effet trouver l’inspiration entre les murs de ce manoir, qui arbore quelques éléments symboliques de la noblesse : un pigeonnier, une chapelle, des douves et même quelques éléments défensifs (murs de protection, etc.)
Les villes de Saumur, Chinon, Montreuil-Bellay ou encore Beaufort-en-Vallée regorgent d’hôtels particuliers, demeures de la bourgeoisie urbaine. Pour les beaux jours, ces familles disposent généralement d’une maison de campagne toute simple, entourée d’un petit domaine agricole. Les Rabelais, par exemple, possédaient à la fois un hôtel particulier à Chinon, et le domaine de la Devinière, à Seuilly. C’est une maison de maître à deux étages, construite en tuffeau, qui abrite aujourd’hui le musée consacré au célèbre écrivain François Rabelais.
Aux XVIIe et XVIIIe siècles, ces domaines ruraux sont nombreux autour des villes comme Saumur, et portent des noms évocateurs de plaisirs rustiques : le Pavillon, Plaisance, Tivoli, Beausoleil, le Petit-Versailles...